« Epidémie d’intolérance » au Lévothyrox

« L’épidémie » d’intolérance au nouveau Lévothyrox devrait s’estomper. Les malades qui se sont plaints d’effets indésirables pourront revenir – au moins transitoirement – à l’ancien Lévothyrox et ceux qui n’ont pas ressenti de modifications à la suite du passage au nouveau Lévothyrox continuer à le prendre.

Les compléments d’informations apportées par l’ANSM pourront convaincre de la bioéquivalence réelle entre les 2 formulations selon les critères statistiques habituels. Si la comparaison avait été faite sur 2 lots de l’ancien Lévothyrox les résultats n’auraient probablement pas été différents de ceux qui ont été obtenus avec les 2 formulations. On peut seulement souligner que l’étude principale a été faite avec une administration de 600 microgrammes soit environ 6 fois plus que la dose quotidienne habituelle.

Cette affaire du Lévothyrox appelle quelques réflexions.

Le Lévothyrox, lévothyroxine , L-T4, est un des médicaments les moins dosés en principe actif, il y a peu de principe actif par rapport à l’excipient. Par exemple un comprimé à 25 microgrammes pesant 250 milligrammes nécessite une dilution au 10 000 ième , soit 1 g de principe actif pour 10 kg d’excipient. L’obtention d’un comprimé à 25 microgrammes de principe actif de manière reproductible dans le temps est plus difficile que celle d’un comprimé à 25 mg dans un comprimé de 250 mg, (1000 microgrammes = 1 mg).

L’établissement d’une bioéquivalence entre 2 formulations de L-T4 est rendue plus difficile du fait  que la L-T4 et son « métabolite » , la L-T3, sont déjà présents dans l’organisme à des concentrations variées et variables chez les volontaires sains et chez les malades avant la mise en route de toute étude. Au contraire, la plupart des autres médicaments ne sont pas présents dans l’organisme chez les personnes non traitées, on part de la concentration 0.

Une étude de bioéquivalence, même parfaite, faite à un moment donné ne garantit pas que par la suite il n’y aura pas de dérive dans la composition quantitative ou qualitative des préparations commercialisées. On retombe dans le contrôle habituel de la qualité des médicaments, génériques ou non. Lorsque surviennent des troubles inhabituels susceptibles d’être liés à une modification de la qualité du médicament considéré,  le laboratoire fabricant et l’ANSM devraient publier les résultats des contrôles effectués et éventuellement en faire d’autres. 

La méthode de dosage utilisée importe. La méthode de dosage la plus appropriée dans la majorité des cas est la LC-MS/MS (Liquid Chromatography-Mass Spectrometry/ Mass Spectrometry). C’est celle qui a été utilisée pour l’étude de la bioéquivalence de l’ancien et du nouveau Lévothyrox. Pour chaque méthode il faut, entre autres choses, établir la limite de détection et la reproductibilité (dispersion des résultats de plusieurs dosages à partir du même échantillon homogène) à concentration basse, moyenne et élevée. Ceci permet de s’assurer que la dispersion des résultats n’est pas due à la méthode de dosage mais correspond à une réalité biologique.

Sachant  que la bioéquivalence de diverses présentions de L-T4  a été contestée par le passé, il aurait fallu que l’ANS, lors  du changement de formulation du Lévothyrox, mette à la disposition de  tous  une publication de type scientifique  rassemblant les résultats sous une forme concise.  L’article publié en 2016 dont l’existence n’était pas signalée par l’ANSM, comporte un résumé succinct mais le  texte entier n’est accessible que moyennant paiement, 45 euros pour 24 heures de consultation, 344 euros pour 30 jours ! Ce type de document devrait être accessible gratuitement. Les rapports de type dossier d’AMM sont trop détaillés et délayés pour être facilement consultables. Par ailleurs, comme nous l’avons dit précédemment, les résultats des contrôles de qualité des médicaments commercialisés, notamment quantité théorique, quantité trouvée, dispersion des résultats, devraient aussi être accessibles sous une forme concise.

Je crois que la mise à disposition de tous de données de type scientifique, même si tout peut être mis en cause, réduirai les errements dans l’interprétation des problèmes qui surgissent. 

Voir Critères de validité d’une méthode de mesure.

 

 

 

 

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