Médicaments : rien de nouveau sous le soleil ?

« Le pipeline des nouveaux médicaments en psychiatrie est désespérément vide, les efforts de recherche en neurosciences sont plus fondamentaux que cliniques. Les psychiatres doivent donc chercher à utiliser les médicaments dont on dispose d’une manière créative hors des normes habituelles  et à recourir à d’autres thérapies comme l’’électroconvulsivothérapie. » Ce texte est tiré d’’un Journal Watch NEJM de décembre 2014.

Cette stagnation n’est pas propre à la psychiatrie, elle touche les autres domaines, neurologie cardiologie, cancérologie…

Alors que fait l’’industrie pharmaceutique ? Elle bricole avec des vieux produits dormant dans les tiroirs ou déjà  commercialisés, les associe et les présente, avec l’’aval des autorités politiques, comme des nouveautés (par exemple naltrexone + bupropion). En ce qui concerne les maladies graves très handicapantes ou rapidement mortelles, là tout est permis, on peut commercialiser à la pelle des nouveaux médicaments sans aucun intérêt, comme le confirme leur ASMR ; en cancérologie les nouveaux médicaments qui, comparativement aux vieux médicaments, prolongent notablement la durée de survie globale, sont bien rares.

Vous allez certainement dire : ce grincheux ne connait pas les progrès spectaculaires dans le traitement de l’’hépatite virale C chronique. C’est certainement vrai mais je sais cependant que de nouveaux médicaments arrivent, j’’en cite quelques-uns au hasard : ABT-450, daclatasvir, dasabuvir, ledipasvir, ombitasvir,  simeprevir, sofosbuvir, paritaprevir… Je dois avouer que je n’’ai pas bien compris la « situation » en France du sofosbuvir, Sovaldi*, et de l’’association « ledipasvir/sofosbuvir 90 mg/400 mg Gilead » et je mets un lien vers leur RCP : RCP Sovaldi, RCP Ledipasvir/sofosbuvir. Le prix du  Sovaldi* est connu, 488,095 €, hors taxes le comprimé, selon le Journal officiel, soit 13666,66 la boîte de 28 comprimés,  le prix a été fixé avec beaucoup d’’attention et avec une extrême précision, au millième d’’euro près, c’’est du sérieux ! Quand le Viekira Pak, dont la commercialisation aux USA a été autorisée par la FDA le 19 décembre 2014, va être commercialisé en Europe et en France, combien va-t-il coûter ?  Rappelons que Viekira Pak est composé de 3 nouveaux médicaments, ombitasvir, paritaprevir et dasabuvir + ritonavir destiné à augmenter la concentration de paritaprevir.

Admettons que ces nouveaux médicaments guérissent l’’hépatite C chronique, leur prix exorbitant est-il pour autant justifié ? L’’industrie pharmaceutique tend à le justifier par les investissements engagés pour la recherche et le développement et/ou par les économies qu’’ils permettent de faire en raison de leur efficacité. Rappelons que le Rimifon*, l’isoniazide,  sorti il y a plus de 60 ans, a été à l’’origine de l’éradication de la tuberculose à l’’échelle mondiale, son prix était pourtant du même ordre que celui des autres médicaments. Le coût des études précliniques est le même pour un « bon » médicament et un « médiocre »  : parmi plusieurs molécules testées on retient celles qui paraissent les plus prometteuses. Le coût des études cliniques tend à être  inversement proportionnel à leur intérêt : plus un médicament est efficace et bien toléré plus il est facile de le démontrer, par contre quand on a une molécule dont on ne sait que faire et que finalement on lui trouve une indication où elle ne fait pas mieux que les médicaments existants, il faut plus de persévérance et de dépenses pour convaincre de son intérêt.

Peut-on laisser l’’industrie pharmaceutique déverser sa production à des prix faramineux imposés par elle ? La réponse est non car la société ne pourra pas indéfiniment prendre en charge de telles dépenses. De plus l’arrivée incessante de nouveaux médicaments, la plupart sans intérêt, désorganise tout, les médecins sont paumés, les pharmacologues sont largués, des spécialistes comme les cancérologues sont noyés dans les essais cliniques coûteux et inutiles.

Peut-on remédier à cette invasion de produits nouveaux à de tels prix. La réponse, s’il y en a une, est politique et on ne la voit guère se dessiner. L’industrie pharmaceutique est internationale et surtout nord-américaine. La FDA contrôle l’’usage des médicaments et parallèlement, en autorisant  leur commercialisation aux USA à prix élevé, leur ouvre de fait le marché mondial et en conséquence des gains financiers énormes… qui reviennent en grande partie aux USA.

Chez nous, le pouvoir politique peut continuer à s’’amuser à ses petits jeux mais il faut reconnaître que nous ne jouons pas dans la cour des grands, je devrais dire du grand.

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