Auteur : Pierre Allain

Caractéristiques générales des molécules

Les deux principales caractéristiques qui gouvernent les interactions entre médicaments et molécules biologiques sont leur structure spatiale et leur distribution électronique.

Structure spatiale

La structure d’une molécule est déterminée par sa configuration et sa conformation.

Configuration

La structure spatiale d’une molécule, médicament ou substance endogène, dépend de la disposition relative de chacun des atomes qui la constituent. Cette disposition dépend elle-même du nombre d’électrons de valence, de l’orientation de leurs orbitales dans l’espace et des distances interatomiques. Une même molécule ne possède qu’une seule configuration, c’est-à-dire un seul ordre d’enchaînement des atomes les uns par rapport aux autres, avec des longueurs de liaison bien déterminées.

L’isomérie est une particularité de la structure spatiale de certaines molécules, notamment celles qui comportent un carbone asymétrique, c’est-à-dire un carbone lié à quatre substituants différents. La distribution spatiale de ces quatre substituants est différente dans deux molécules par ailleurs semblables et qui sont appelées isomères.

Ces isomères, qui sont l’image l’un de l’autre dans un miroir plan, sont comparables à une main droite et une main gauche et sont appelés molécules chirales. Ils sont, par convention, désignés par les lettres R (Rectus) et S (Sinister), selon la disposition relative de leurs substituants dans l’espace. On ne peut pas passer d’un isomère R à un isomère S sans casser la molécule pour changer de place aux substituants du carbone asymétrique.

Lorsqu’un médicament est constitué d’un mélange d’isomères S et R, il est dit racémique. Lorsqu’il est constitué d’un seul isomère, R ou S, il est dit énantiopure.

Les isomères R et S peuvent avoir des propriétés semblables, différentes ou même antagonistes. Parmi les médicaments possédant un ou plusieurs carbones asymétriques, on peut citer les ß-bloquants, la fenfluramine, la fluoxétine, la vitamine E. Il serait souhaitable que les nouveaux médicaments soient, de plus en plus, de type éniantiopure.

Il existe également des diastéréo-isomères, ou isomères géométriques, en fonction de la disposition des substituants par rapport à une structure fixe, double liaison ou plan, tel un cycle. Ils sont désignés par les termes cis et trans. Les acides gras insaturés cis et trans ont des propriétés physico-chimiques et biologiques différentes.

Conformation

Une molécule ne possède qu’une seule configuration mais elle peut, si elle comporte des liaisons simples, prendre différentes conformations en raison de la libre rotation des atomes autour des liaisons simples. A chaque conformation correspond une « forme » particulière de la molécule dans l’espace.

Chaque molécule possède une ou deux conformations privilégiées en raison de l’encombrement stérique des groupes d’atomes concernés et des phénomènes de répulsion ou d’attraction électrostatique qui existent entre eux.

La possibilité de changer de conformation donne aux molécules une flexibilité leur permettant de s’adapter les unes aux autres dans l’espace. On parle dans ce cas de conformations induites. Cette adaptabilité conformationnelle joue un rôle déterminant dans la plupart des phénomènes biologiques.

Distribution des électrons : polarité et polarisabilité

La polarité d’une molécule provient de la distribution non homogène de son nuage électronique.

La densité électronique, c’est-à-dire la répartition des électrons dans une molécule, n’est généralement pas uniforme. Les électrons s’accumulent autour de certains atomes qui les attirent et augmentent ainsi leur charge négative, alors que d’autres atomes les repoussent et prennent une charge positive.

Plus la charge est localisée dans un petit espace, plus elle est réactive. La densité électronique d’un ion est d’autant plus importante que sa charge est élevée (1, 2, 3) et que son rayon est faible (Voir « Ionisation, pouvoir polarisant ».).

Une zone à forte densité électronique d’une molécule est appelée zone nucléophile parce qu’elle réagit préférentiellement avec une zone à faible densité électronique d’une autre molécule, appelée électrophile.

La polarisabilité désigne non pas la distribution électronique dans une molécule en absence d’influence externe, mais la facilité avec laquelle son nuage électronique peut être déplacé sous l’effet d’un champ électrique ou d’une autre molécule. En général, la polarisabilité des atomes faiblement chargés et comportant un grand nombre d’électrons est élevée. Ainsi la polarisabilité du groupe SH est environ trois fois plus élevée que celle du groupe OH, l’atome de soufre comportant seize électrons alors que l’oxygène n’en a que huit. La polarisabilité de S est beaucoup plus élevée que celle de O.