Aluminium, quelle toxicité ?

L’aluminium est un métal léger, de masse atomique 27, très répandu dans la nature. Sa concentration atteint environ 8% dans l’écorce terrestre. Il n’a aucune fonction physiologique connue.

Le rayon de l’ion Al3+ est de 0,5 Angström, il est donc très polarisant, ce qui explique qu’il interagit avec les molécules d’eau, les anions OH-, SO42-, PO43-, F-. En fonction du pH il est présent dans les milieux biologiques sous formes de complexes cationiques, neutres ou anioniques.

L’aluminium est très peu absorbé par le tube digestif et on ne connaît guère les mécanismes de son absorption.  La concentration normale d’aluminium dans le sang est inférieure à 5 microgrammes par litre et sa concentration dans les tissus est également très faible. L’aluminium s’élimine essentiellement par le rein et la mesure de sa concentration urinaire constitue une méthode valable d’appréciation de son absorption digestive, en absence d’insuffisance rénale.

Nous avons déjà parlé de l’utilisation de l’aluminium en thérapeutique.

La toxicité de l’aluminium a été clairement démontrée chez les insuffisants rénaux dialysés lorsque le liquide de dialyse en contenait des quantités importantes; cette toxicité a été suspectée chez des personnes utilisant des aliments ou des boissons riches en aluminium ou ayant été vaccinées par des vaccins contenant de l’hydroxyde d’aluminium.

Chez les insuffisants rénaux dialysés l’aluminium a provoqué des encéphalopathies avec myoclonies, dysarthrie, convulsions, et des atteintes osseuses. Ces troubles ont été découverts à la fin des années 1970, voir par exemple ceci, et très largement confirmés par la suite. La principale cause de ces encéphalopathies a été la contamination de l’eau utilisée en dialyse par l’aluminium : lorsque la concentration en aluminium du liquide de dialyse était élevée l’aluminium passait du liquide de dialyse dans le sang et inversement lorsque la concentration du liquide de dialyse était très faible. Chez les dialysés, une très faible partie de l’aluminium pris par voie buccale pour prévenir les hyperphosphatémies était absorbée par le tube digestif et ensuite éliminée dans le bain de dialyse seulement lorsque le liquide de dialyse contenait très peu d’aluminium, quelques microgrammes par litre. L’insuffisance rénale en empêchant l’élimination de l’aluminium qui était passé dans le  sang a joué un rôle déterminant dans la genèse des encéphalopathies.

En pratique, un contrôle strict de la concentration d’aluminium dans les liquides de dialyse et les solutés injectables, en particulier en perfusion intraveineuse, doit être maintenu.

L’aluminium présent dans l’alimentation, boissons et aliments, joue-t-il un rôle dans la genèse de certaines maladies, en particulier les maladies neurologiques, dans la population générale, sans insuffisance rénale ?  Rien n’est clairement démontré. Une étude épidémiologique menée en France a constaté une augmentation du risque de démence lorsque la concentration d’aluminium dans l’eau de boissons dépassait 100 microgrammes par litre,  sans cependant trouver une corrélation entre cette fréquence et la concentration. Il s’agit d’études complexes comportant de nombreux paramètres avec possibilité de nombreux biais. Le fait que l’on n’ait pas décrit de troubles caractérisés chez des malades sans insuffisance rénale, ayant pris pendant de longues périodes pour traiter des troubles digestifs diverses spécialités pharmaceutiques contenant de très grandes quantités d’aluminium, est plutôt rassurant. Et pourtant la prise de ces spécialités à base d’aluminium entraîne une absorption digestive d’aluminium : ainsi, la prise de sucralfate, qui est un des médicaments à visée digestive contenant de l’aluminium et qui est considéré comme peu absorbé, entraîne une augmentation des concentrations plasmatiques et urinaires d’aluminium, voir cet article. On sait par ailleurs que les diverses « formes » sous lesquelles l’aluminium est présent traversent différemment la barrière digestive et hémato-encéphalique. Mais rien ne prouve que l’aluminium présent dans l’alimentation existe sous une forme particulièrement toxique. L’aluminium alimentaire n’apparaît pas comme un facteur causal déterminant dans des maladies de type Alzheimer ;  tout au plus, si l’on admet une origine multifactorielle à ces maladies, on pourrait penser qu’il puisse y contribuer et ce doute pourrait expliquer que l’on cherche à limiter sa présence dans les aliments et les boissons.

Concernant la teneur en aluminium de l’eau potable en France on peut consulter le Ministère de la Santé à « Résultats des analyses du contrôle sanitaire des eaux destinées à la consommation humaine » ; on constate que la concentration d’aluminium n’est donnée  que dans quelques bulletins d’analyse (dans certaines localités en Bretagne par exemple) mais pas dans la plupart des bulletins des  autres régions, ce qui est regrettable car, compte tenu des interrogations et des polémiques à ce sujet, il serait normal  que cette concentration soit indiquée dans tous les bulletins ! Ceci est du ressort du Ministre de la Santé puisque les bulletins sont publiés  à l’en-tête de son Ministère.

En ce qui concerne les emballages en aluminium, on pourrait proposer de les remplacer par du plastique, mais alors on pensera à d’autres toxiques comme le bisphénol A ! Quant aux ustensiles de cuisine en aluminium, on peut les remplacer par d’autres en inox, mais c’est plus coûteux !

En ce qui concerne les médicaments à base d’aluminium utilisés en gastro-entérologie : éviter d’y recourir chez les patients avec insuffisance rénale, pour les autres (sur prescription ou en automédication) faire des cures intermittentes, par mesure de précaution, même si leur toxicité n’est pas démontrée.  

Aluminium et vaccins, nous en avons déjà parlé en 2001 et en 2008 (NALP3). L’aluminium (utilisé dans les vaccins comme adsorbant et stimulant de l’immunité) entraînerait la formation de microcristaux (avec équilibre entre la forme liquide et solide ?) conduisant à des réactions inflammatoires au lieu d’injection et à distance, et peut-être à des maladies particulières souvent assez difficiles à cerner. Question controversée : fréquence des cas, responsabilité du vaccin ou de l’aluminium ?

En pratique, l’aluminium est de moins en moins utilisé dans les vaccins.

Au total, le risque d’intoxication chronique par l’aluminium dans la population générale sans insuffisance rénale semble faible. De plus, rien n’empêche de chercher à réduire sa « consommation » car  l’aluminium n’est pas un élément essentiel (il n’a aucune fonction physiologique connue) il n’y a pas de déficience, on peut s’en passer sans crainte. Mais comme il s’agit d’un élément très largement présent dans l’environnement il n’est pas toujours facile de s’en défaire.

En matière d’analyse, de dosage d’aluminium, il faut savoir que l’aluminium est présent dans tout notre environnement et que de très grandes précautions sont nécessaires pour éviter la contamination des échantillons biologiques lors de leur prélèvement et lors de leur conservation (les solutions de fixation utilisées en histologie comme le formaldéhyde peuvent contenir de très grandes quantités d’aluminium) et de leur manipulation. Il est probable que ce type de contamination n’a pas toujours été pris en considération dans les études.

Pour avoir une vue d’ensemble de la toxicité d’autres métaux que l’aluminium, voir :

Voir aussi Chélateurs.

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