Evolution et gravité de la grippe A H1N1

Un article paru dans le BMJ du 8 décembre 2009 (Liam J Donaldson) fait le point sur la mortalité provoquée par la grippe A H1N1 en Angleterre depuis son début jusqu’au 8 novembre 2009. Les auteurs ont compté 138 décès pouvant être rapportés à la grippe A H1N1, 26 décès pour 100 000 personnes atteintes, 2,7 décès pour un million d’habitants, environ un tiers des personnes décédées n’avaient pas de facteurs de risque pré-existants. Les auteurs recommandent la vaccination et la prise précoce d’antiviraux en début de l’infection (tout en notant qu’il n’y a pas d’étude démontrant efficacité des antiviraux). Ils indiquent également que la mortalité aurait été de 2 à 3 % des personnes atteintes au cours de l’épidémie 1918 et de 0.2 % au cours des épidémies de 1957 et 1967. La mortalité 2009 en Angleterre serait de 0.026 % des personnes atteintes, soit environ 1 décès pour 4000 cas.

L’InVS, dans le Bulletin épidémiologique A H1N1du 15 décembre 2009, fait le point sur l’évolution et les conséquences de la grippe en France. Il y a 150 décès dont 25 sans facteur de risque connu. Le Bulletin du 22 décembre indique que le nombre de décès s’élève à 176 dont 28 sans facteur de risque connu. Ces Bulletins montrent l’évolution de l’épidémie mais n’apportent pas de précisions sur les particularités des personnes décédées ou gravement atteintes et ne différencient pas les cas confirmés biologiquement des autres. Ces 176 malades ont certainement été hospitalisés avant leur décès, ont eu divers examens et leurs observations ont été rédigées. Rassembler ces 176 observations et les analyser ne semble pas un travail herculéen, il est regrettable qu’il n’ait pas été fait et publié (s’il a été fait pourquoi ne pas le publier ?). Des données objectives et peu contestables (aux erreurs près, inhérentes à tout travail) permettraient à chacun et en particulier aux médecins d’avoir une meilleure idée de ce qui se passe vraiment et d’avoir des arguments pour justifier leurs attitudes.

Dans le NEJM du 24 décembre 2009, des auteurs chinois décrivent le déroulement de la grippe A H1N1 en Chine, confirmée biologiquement par RT-PCR, chez 426 malades qui ont été hospitalisés. Près de la moitié des malades revenaient d’un séjour aux USA, le symptôme le plus fréquent était la toux, un mal de gorge, une expectoration claire ou jaune, une fièvre supérieure à 39°C n’était observée que chez seulement 10 % des malades et le signe le plus fréquent était l’angine (traduction de « congestion of throat et swelling of tonsils), une lymphopénie était fréquemment observée. La durée d’incubation médiane était de 2 jours avec des durées allant de 1 à 7 jours. La durée de présence du virus détecté par RT-PCR était en moyenne de 6 jours mais pouvait atteindre 17 jours (infection se poursuivant). Les malades présentant une pneumonie (19 cas sur 426) ont été immédiatement traités par oseltamivir. Il n’y a pas eu de décès.

Dans le NEJM du 24 décembre 2009, des auteurs américains décrivent un des premiers cas de grippe A H1N1 aux USA, survenu chez un homme de 29 ans, sans antécédent particulier, qui en est mort. La maladie a débuté par des manifestations habituelles de la grippe mais sans doute assez alarmantes pour avoir conduit le malade à se présenter à 2 jours d’intervalle à l’urgence d’un premier hôpital avant d’être hospitalisé dans un deuxième hôpital. Devant un test rapide négatif pour la grippe, une multitude d’autres diagnostics ont été évoqués et écartés par des tests biologiques. Un traitement lourd  a été mis en œuvre : antibiotiques doxycycline, lévofloxacine et gentamicine et autres médicaments ibuprofène, paracétamol, ondansétron, codéine, ranitidine et enfin plus tardivement oseltamivir. L’état du malade a empiré et l’analyse par RT-PCR a permis d’affirmer le diagnostic de grippe A H1N1. Ce malade est décédé. Cette observation me parait importante car elle montre qu’un grand nombre de causes peuvent donner des manifestations cliniques de type grippal. Seule l’analyse par RT-PCR permet dans les cas graves de ne pas passer à côté d’une grippe et de ne pas attribuer à la grippe ce qui ne lui revient pas. Le traitement antiviral doit en cas de suspicion de grippe inquiétante être mis en route dès le début, avant d’avoir le résultat de la RT-PCR. Les tests rapides négatifs n’excluent pas une infection par le virus A H1N1.

Le NEJM, décembre 2009,  décrit les particularités de la grippe A H1N1 chez 94 femmes enceintes, et chez 137 femmes non enceintes ayant nécessité une hospitalisation. Un tiers des femmes enceintes avait un facteur de risque, l’asthme par exemple, en dehors de la grossesse, alors que les deux tiers des femmes non enceintes avaient un ou deux facteurs de risque. La grippe A H1N1 touche les femmes enceintes alors que les grippes saisonnières habituelles ne le faisaient guère.

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