Auteur : Pierre Allain

Antagonistes des récepteurs adrénergiques bêta ou bêta-bloquants

On appelle ß-bloquants ou ß-bloqueurs les médicaments qui inhibent les récepteurs adrénergiques ß.

Pour comprendre les conséquences de l’inhibition des récepteurs ß, il faut avoir présents à l’esprit les effets de la stimulation ß.

  1. La stimulation des récepteurs postsynaptiques ß1 entraîne :
    • des effets cardiaques inotrope, chronotrope, dromotrope et bathmotrope positifs avec augmentation du débit cardiaque et des besoins en oxygène.
    • une augmentation de la sécrétion de rénine.
  2. La stimulation des récepteurs postsynaptiques ß2 entraîne : une vasodilatation, une bronchodilatation, un relâchement utérin, des effets métaboliques, des effets inotrope et chronotrope positifs indiscutables mais moindres que ceux qui résultent de la stimulation des récepteurs ß1.
  3. La stimulation des récepteurs présynaptiques ß2 augmente la libération de noradrénaline.

L’inhibition de ces récepteurs adrénergiques ß provoque une diminution ou une suppression des effets dus à leur stimulation par les catécholamines endogènes. Les effets seront d’autant plus importants que la stimulation endogène était importante. L’inhibition des effets ß peut améliorer certains symptômes mais en aggraver d’autres, en fonction de l’état du malade.

Effets

Les ß-bloqueurs ont des effets communs et des effets particuliers à un certain nombre d’entre eux.

Effets communs

Les effets des ß-bloqueurs sont essentiellement cardiovasculaires.

Ils ralentissent le cœur en diminuant la pente de dépolarisation diastolique lente et constituent la classe II des médicaments antiarythmiques. Ils diminuent le travail du cœur et réduisent ses besoins en oxygène, ce qui permet de les utiliser dans le traitement préventif de l’angor.

Ils diminuent, après une période de latence, l’hypertension artérielle pathologique, par des mécanismes complexes, diminution du débit cardiaque, inhibition de la sécrétion de rénine, et peut-être une inhibition du tonus sympathique par effet central. Mais ce ne sont pas de véritables hypotenseurs car ils n’abaissent pas, à doses thérapeutiques, la pression artérielle normale.

Les ß-bloqueurs abaissent la pression intra-oculaire en diminuant la sécrétion de l’humeur aqueuse.

Effets particuliers

  • Un certain nombre de ß-bloqueurs possèdent une activité ß-mimétique faible, appelée parfois activité sympathomimétique intrinsèque ou ASI, ce qui fait qu’il persiste une certaine stimulation de type ß. Il s’agit de médicaments ayant une grande affinité pour les récepteurs ß sur lesquels ils se fixent et une faible activité ß+. En se fixant sur les récepteurs ß, ils empêchent les catécholamines endogènes d’entraîner des effets ß et sont donc de véritables ß-bloqueurs.
  • Les ß-bloqueurs sont classés en fonction de l’inhibition plus ou moins sélective des récepteurs ß1 et ß2. Certains ß-bloqueurs inhibent à la fois les récepteurs ß1 et ß2, d’autres inhibent seulement les récepteurs ß1. Ces derniers sont dits cardiosélectifs. Il n’a pas paru intéressant en thérapeutique d’inhiber sélectivement les récepteurs ß2.
  • Enfin, outre leur activité ß-bloquante, certains ß-bloquants comme le propranolol et l’acébutolol ont, directement ou par l’intermédiaire de leurs métabolites, un effet stabilisant de membrane qui ralentit les échanges ioniques transmembranaires. Cette activité, appelée parfois de type anesthésique local ou anti-arythmique, ralentit la vitesse de dépolarisation par entrée de sodium.
  • Certains ß-bloqueurs peuvent avoir d’autres particularités.
    Le labétolol et le carvédilol ont un effet a1-bloquant, le céliprolol un effet ß2-agoniste.
    Par ailleurs le propranolol inhibe le transport de l’iode dans le follicule thyroïdien.
    Le carvédilol aurait, au moins in vitro, des propriétés antioxydantes. Le nébivolol a un effet vasodilatateur de type NO-mimétique.

Caractéristiques pharmacocinétiques

On peut distinguer les ß-bloqueurs liposolubles et hydrosolubles.

  1. En règle générale, les ß-bloqueurs très liposolubles comme le propranolol et l’oxyprénolol ont des caractéristiques communes :
    • ils sont rapidement et complètement absorbés par le tube digestif.
    • ils sont métabolisés au niveau hépatique et peuvent subir une inactivation dite de premier passage. Leur ingestion en même temps que des aliments peut réduire l’importance de ce phénomène de premier passage et augmenter leur biodisponibilité.
    • ils sont liés à 90% aux protéines plasmatiques.
    • ils ont un très grand volume de distribution, c’est-à-dire qu’ils diffusent dans l’ensemble des tissus.
    • ils ont une assez courte durée d’action et une demi-vie plasmatique courte.
  2. À l’opposé les ß-bloqueurs hydrosolubles comme l’aténolol, le nadolol et le sotalol ont les propriétés suivantes :
    • ils sont moins bien absorbés par le tube digestif et d’une manière plus irrégulière.
    • ils sont peu métabolisés par le foie.
    • ils sont peu liés aux protéines plasmatiques.
    • ils s’excrètent essentiellement par le rein sous forme inchangée.
    • ils ont un volume de distribution restreint.
    • ils ont une demi-vie plasmatique longue.
  3. Entre ces deux extrêmes, ß-bloqueurs très liposolubles et ß-bloqueurs très hydrosolubles, il existe des produits intermédiaires comme le pindolol, le céliprolol.
  4. Mais en pratique ces considérations générales sur la pharmacocinétique des bêta-bloqueurs sont insuffisantes pour la prescription de l’un d’eux ; il est nécessaire dans ce cas de prendre connaissance des caractéristiques pharmacocinétiques propres de chaque produit.
:

Indications

Les ß-bloqueurs ont de nombreuses indications.

  1. Indications cardiovasculaires :
    • traitement de l’angor : en prévention des crises
    • traitement de tachycardies de diverses origines dont celles de l’hyperthyroïdie, notamment la maladie de Basedow où on utilise surtout le propranolol
    • traitement de l’hypertension artérielle
    • traitement de l’infarctus du myocarde
    • indication en apparence paradoxale : l’insuffisance cardiaque. En réalité, il y a au cours de l’insuffisance cardiaque une hyperstimulation sympathique avec augmentation de la noradrénaline plasmatique et une diminution de la réactivité des récepteurs ß. L’inhibition des récepteurs ß peut, en soustrayant le cœur à l’hyperstimulation sympathique, améliorer son fonctionnement. La mise en route d’un traitement de l’insuffisance cardiaque par ß-bloqueants nécessite une surveillance étroite. Les trois b-bloquants ayant montré leur efficacité dans cette indication sont le bisoprolol, le métoprolol et le carvedilol. Il est possible que les ß-bloquants ayant de plus un effet antagoniste a1 comme le carvédilol soient plus appropriés à ce type de traitement.
  2. Autres indications :
    • prévention primaire et secondaire des hémorragies digestives par hypertension portale et de la rupture de varices sophagiennes, c’est le propranolol qui est habituellement utilisé
    • traitement des migraines, des tremblements, des manifestations somatiques transitoires de l’anxiété, de la dépendance alcoolique dans laquelle on observe une hyperstimulation ß. Dans ce cas, c’est le propranolol que l’on prescrit habituellement.
    • traitement du glaucome, en administration locale, sous forme de collyres, mais ils peuvent diffuser dans la circulation générale et donner des effets indésirables.
    • traitement des hémangiomes infantiles, le propranolol est efficace.

      Propranolol

      HEMANGIOL* Solution buvable

D’une manière générale la posologie des ß-bloquants doit être progressivement croissante au début du traitement, décroissante à l’arrêt avec surveillance et repos.

Présentations pharmaceutiques

L’ensemble des ß-bloquants est présenté sous forme de comprimés ou de gélules, quelques-uns d’entre eux sous forme injectable sont destinés au traitement des troubles aigus du rythme cardiaque et à celui de l’infarctus du myocarde en phase aiguë.

  • ß-bloquants, non cardiosélectifs, sans ASI. (activité sympathomimétique intrinsèque)

    Propranolol

    AVLOCARDYL*Cp, Cp LP, Inj

    Nadolol

    CORGARD* Cp

    Sotalol

    SOTALEX* Cp, Inj

    Tertatolol

    ARTEX* Cp

    Timolol

    TIMACOR* Cp

    Labétolol(a1-)

    TRANDATE* Cp, Inj

    Carvédilol(a1-)

    KREDEX* Cp

  • ß-bloquants, non cardiosélectifs, avec ASI.

    Pindolol

    VISKEN* Cp

  • ß1-bloquants, cardiosélectifs, sans A.S.I.

    Aténolol

    TÉNORMINE* Cp, Inj

    Bétaxolol

    KERLONE* Cp

    Bisoprolol

    DETENSIEL* Cp

    CARDENSIEL*  Cp

    Métoprolol

    LOPRESSOR* Cp
    SELOKEN* LP Cp, Inj

    Esmolol

    BRÉVIBLOC* Inj

    Nébivolol

    TEMERIT*, Cp
    NEBILOX* Cp

  • ß1-bloquants, cardiosélectifs, avec A.S.I.

    Acébutolol

    SECTRAL* Cp, Sol buv, Inj

    Céliprolol
    1 et ß2+)

    CÉLECTOL* Cp

  • ß-bloquants associés à un diurétique
    Un certain nombre de spécialités pharmaceutiques contiennent un ß-bloquant associé à un diurétique.

    Métoprolol + chortalidone

    LOGROTON* Cp

    Pindolol + clopamide

    VISKALDIX*

    Timolol + amiloride + hydrochlorothiazide

    MODUCREN*

    Oxprénolol + chlortalidone

    TRASITENSINE*

    Bisoprolol + hydrochlorothiazide

    LODOZ*

    Aténolol + chlortalidone

    TÉNORÉTIC* Cp

  • Collyres ß-bloquants antiglaucomateux
    Les ß-bloquants utilisés dans le traitement du glaucome sont présentés sous forme de collyre. Comme sous la même dénomination commerciale il peut exister à des concentrations différentes du produit actif, lors de sa prescription, le médecin doit préciser celle-ci, par exemple 1%, 2%…

     

    Bétaxolol

    BETOPTIC* Collyre 0,25%

    Cartéolol

    CARTÉOL* 1% et 2%

    Métipranolol

    BÉTANOL* 0,1%, 0,3%, 0,6%

    Timolol

    TIMOPTOL* 0,10, 0,25 et 0,50%
    TIMOPTOL-LP* 0,25 et 0,50%
    GAOPTOL* 0,25% et 0,50%

    Lévobunolol

    BÉTAGAN* 0,50%

Il existe de plus des spécialités associant un bêta-bloqueur à un principe actif d’une autre classe.

Effets indésirables

Les ß-bloquants peuvent être à l’origine de divers effets indésirables :

  1. Aggravation d’une insuffisance cardiaque. L’insuffisance cardiaque est une contre-indication relative à l’utilisation des ß-bloqueurs : la mise en route d’un tel traitement ne peut se faire en absence d’une analyse rigoureuse de l’état du malade et de la possibilité d’une surveillance étroite.
  2. Aggravation possible d’un trouble du rythme. La bradycardie, les blocs auriculo-ventriculaires sont aussi des contre-indications à leur prescription.
  3. Refroidissements des extrémités, aggravation possible d’une artérite, surtout avec les ß1, ß2 bloquants mais parfois aussi avec les ß1-sélectifs.
  4. Aggravation possible de la maladie asthmatique, surtout avec des ß1 ß2 mais aussi parfois avec les ß1.
  5. Risque aggravé de choc anaphylactique par inhibition partielle des mécanismes qui s’y opposent.
  6. Troubles métaboliques :
    • augmentation des triglycérides;
    • augmentation du cholestérol et des VLDL (very low density lipoproteins); majoration de l’hypoglycémie chez les diabétiques
    • risque majoré de développer un diabète de type II chez les hypertendus traités pendant plusieurs années par ß-bloqueurs.
  7. Troubles divers, rares : troubles immunologiques, lupus, fibroses.
  8. Rebond des symptômes à l’arrêt brutal du ß-bloquant : tachycardie, hypertension artérielle, malaises, sueurs, nervosité, surtout chez le coronarien où il existe un risque d’infarctus et de mort subite.
  9. Diffusion dans l’organisme après administration sous forme de collyre. Les collyres à base d’antagonistes ß ont peu d’effets indésirables locaux, l’irritation par exemple, mais des effets indésirables généraux car ils sont absorbés au niveau de la muqueuse oculaire et nasale. Ils provoquent fréquemment chez les personnes âgées bradycardie, asthme etc.
  10. Elimination dans le lait. Les ß-bloqueurs sont déconseillés pendant l’allaitement.
  11. Les surdosages, accidentels ou volontaires, par des ß-bloquants se traduisent par hypotension, bradycardie, divers autres troubles du rythme et choc. Le médicament susceptible de réduire ces troubles est le glucagon car il stimule l’adénylcyclase sans mettre en jeu le récepteur ß qui est bloqué. Les intoxications par ß-bloquants à activité stabilisante de membrane paraissent plus difficiles à traiter que ceux qui sont provoqués par les ß-bloquants qui n’ont pas cette activité.

2 commentaires on “Antagonistes des récepteurs adrénergiques bêta ou bêta-bloquants

  1. avc,malaises vagaux ,1infractus;on m’a mis un sten et donné 2 médicamants(nevibolol et plavix75mg) 1/2 le matin pour le nevibolol et 1 a midi pour le plavix .selon les jours j;ai des sautes d’humeur ,du stress et de la fatigue cela me pourrit la vie et celle de mon epouse;j’ai les doigts gelés,les os qui craquent(genoux),poignetsepaules;la viellesse?!73ans la jeunesse!

Les commentaires sont fermés.