Auteur : Pierre Allain

L’acide ascorbique ou vitamine C

La démonstration de l’efficacité du jus de citron, riche en vitamine C, dans le traitement préventif et curatif du scorbut a été faite en 1747 par un médecin de la marine anglaise, Lind, à partir d’une véritable expérimentation clinique comportant divers types de supplémentations alimentaires. Cette expérience conduisit à donner du jus de citron aux marins anglais qui, ainsi, n’ont plus souffert de scorbut.

L’identification vers 1910 du cobaye comme animal développant très facilement des manifestations de type scorbutique a facilité l’isolement de la vitamine C par Szent-Gyorgy en 1928.

Structure chimique

La vitamine C, ou acide ascorbique, peut être considérée comme un dérivé cyclique des hexoses. Sa caractéristique essentielle est d’exister sous trois degrés d’oxydoréduction différents : la forme réduite ou acide ascorbique, la forme semi-réduite ou mono-oxydée, appelée acide mono-déhydro-ascorbique et la forme oxydée ou acide déhydro-ascorbique.

L’acide mono-déhydro-ascorbique est un radical anion relativement inerte, ne réagissant pas avec l’oxygène car il est stabilisé par résonnance (effet mésomère) et formation d’une liaison hydrogène intra-moléculaire.

L’agent oxydant habituel est l’oxygène dont l’activité est catalysée par des traces de métaux comme le cuivre et le fer.

Métabolisme

L’homme et le cobaye ne synthétisent pas la vitamine C. Ils doivent donc se la procurer dans l’alimentation.

Les végétaux contiennent de grandes quantités de vitamine C, les jus d’orange et de citron étant les exemples les plus connus.

L’acide ascorbique se décompose vers 200°C.

Absorption digestive

La vitamine C est absorbée essentiellement au niveau du duodénum et du jéjunum proximal. Cette absorption est saturable et le pourcentage absorbé diminue avec la dose : ainsi après une prise de 1g et de 5 g, l’absorption est respectivement de 75% et de 20%. Elle est rapide, sodium-dépendante et peut être inhibée par des analogues structuraux.

A fortes doses, l’aspirine réduit l’absorption digestive de vitamine C.

Distribution

Les proportions relatives d’acide ascorbique et d’acide déhydro-ascorbique sont de 90% et 10%. La forme réduite prédomine parce qu’elle est protégée par le glutathion et les composés à groupe SH.

Dans le plasma, l’acide ascorbique est lié réversiblement à l’albumine. La concentration plasmatique considérée comme normale chez l’adulte est supérieure à 6 mg/L, les valeurs inférieures que l’on rencontre fréquemment chez les personnes âgées traduisent une déficience.

Les leucocytes sont riches en vitamine C, ils en contiennent 80 fois plus que le plasma.

Les tissus les plus riches en vitamine C sont le cortex surrénal et l’hypophyse et, à moindre degré, le foie, le muscle et la cornée.

Il n’y a pas de véritable forme de stockage de la vitamine C et, lorsque l’apport cesse, les réserves chutent en deux à trois semaines, la demie-vie corporelle de la vitamine C étant de dix à vingt jours.

L’insuline favoriserait la pénétration intracellulaire de l’acide ascorbique.

Élimination

L’acide ascorbique s’élimine dans les urines lorsque sa concentration plasmatique atteint ou dépasse 12 mg/L. On trouve dans l’urine des métabolites comme l’acide dioxogulonique et l’oxalate.

Les apports recommandés sont de l’ordre de 100 mg/jour. Les besoins sont augmentés en cas de stress ainsi que chez les fumeurs.

Effets

La vitamine C est impliquée dans un grand nombre de réactions biologiques où elle n’agit pas en tant que coenzyme, mais comme oxydoréducteur par interconversion forme oxydée/forme réduite.

Hydroxylation

La vitamine C joue le rôle de transporteur d’électrons et participe à diverses hydroxylations.

  1. Biosynthèse du collagène :
    L’acide ascorbique catalyse l’hydroxylation de la proline et de la lysine en hydroxyproline et hydroxylysine, constituants normaux du collagène. Le collagène forme 30% de la totalité des protéines de l’organisme et entre dans la composition de la peau, de l’os, des dents, du cartilage.
  2. Biosynthèse de la carnitine à partir de la lysine :
    L’acide ascorbique favorise les réactions d’hydroxylation de la triméthyl-lysine et de la butyrobétaïne, précurseurs de la carnitine.
  3. Hydroxylation de certains médiateurs :
    Hydroxylation de la dopamine en noradrénaline sous l’influence de la ß-dopamine hydroxylase. Cette réaction nécessite, en outre, la présence de cuivre. Hydroxylation du para-hydroxy-phényl-pyruvate en acide homogentisique.
  4. Transformation du cholestérol en acides biliaires :
    Ceci explique le faible effet hypolipémiant de la vitamine C, surtout lorsqu’elle est associée à la pectine qui fixe les acides biliaires et empêche leur réabsorption digestive.

Autres effets

  • La vitamine C interagit avec les radicaux libres :
    L’acide ascorbique peut agir comme anti-oxydant et parfois comme pro-oxydant.

    L’acide ascorbique est un donneur d’atome d’hydrogène H qui réagit avec les radicaux libres OH, O2, les transforme en molécules non toxiques et est un anti-oxydant. En présence de cuivre et de fer, il favorise la formation de radicaux superoxyde et a un effet pro-oxydant.

Acide ascorbique + Cu (II) ¾®

Cu (I) + H+ + acide mono-déhydro-ascorbique

Le cuivre I réagit ensuite avec l’eau l’oxygénée avec production d’un radical OH

Cu (I) + H2O2 ¾® Cu (II) + OH + OH

L’association de vitamine C et de cuivre aurait un effet anticancéreux dans les mélanomes qui accumulent les ions cuivre.
  • Elle régénère la vitamine E qui est le principal anti-oxydant membranaire.
  • Elle interagit avec le fer :
    La vitamine C favorise l’absorption digestive du fer non héminique en transformant le fer ferrique en fer ferreux et peut-être en chélatant le fer ferrique.
  • Elle réduit la méthémoglobine en hémoglobine :
    Il n’y a qu’environ 1% de méthémoglobine pour 99% d’hémoglobine, car la méthémoglobine réductase transforme la méthémoglobine en hémoglobine. La vitamine C joue le même rôle.
  • Elle inhibe la formation de composés nitrés dans le tube digestif.
  • Elle inhibe en outre l’agrégation plaquettaire.

Carence

Une carence importante en vitamine C se traduit par le scorbut qui est exceptionnel. Les hypovitaminoses plus discrètes sont très répandues et se manifestent par de l’asthénie, l’amaigrissement, des céphalées, des douleurs osseuses, une moindre résistance aux infections et des troubles hémorragiques.

Une carence grave se traduit de plus par l’apparition d’hématomes et d’hémorragies gingivales.

Le diagnostic de carence peut être effectué par le dosage de la vitamine C dans le plasma où elle est normalement présente à la concentration d’environ 10 mg/L.

Utilisation

Le traitement curatif et prophylactique des carences, d’origine alimentaire ou provoquées par des conditions particulières, constitue une indication indiscutable de la vitamine C.

Par ailleurs, la vitamine C est préconisée comme stimulant des défenses de l’organisme au cours des infections virales comme la grippe et le coryza.

De fortes doses de vitamine C, plusieurs grammes par jour, ont été préconisées par Pauling dans la prévention et le traitement de divers cancers. Mais les résultats obtenus sont controversés.

On trouve de nombreuses préparations à base de vitamine C dans les pharmacies mais, depuis qu’elle n’est plus remboursée par la Sécurité Sociale, son prix tend à augmenter.

La vitamine C, même à fortes doses, donne peu d’effets indésirables :

  • quelques troubles digestifs
  • un léger effet excitant empêchant l’endormissement, il est donc conseillé de la prendre le matin et non le soir
  • une faible augmentation du risque de formation de calculs urinaires oxaliques.

Il faut déconseiller aux malades qui ont une surcharge en fer la prise répétée de vitamine C qui augmente l’absorption du fer et pourrait interagir avec le fer « libre » et entraîner des manifestations toxiques.

3 commentaires on “L’acide ascorbique ou vitamine C

  1. Je m’appelle DJESSOUDE Joël, étudiant en médecine à la Faculté des Sciences de la Santé (FSS) de Cotonou au Bénin (5è année).

    Merci pour cet article et bien d’autres très instructifs que vous mettez à notre disposition (gratuitement en plus). Vos articles bien que très riches manquent de quelques précisions:
    1- La nationalité des savants et chercheurs cités, n’est pas toujours mentionnée.
    2- Le ou les auteurs des articles, date et ville de parution, ne sont pas mentionnés (pour tous les articles que j’ai eu à lire).
    Merci.

    • Merci pour votre message. Pour les articles du magazine, en général nous donnons le lien vers l’article original dans la revue dans laquelle il est paru. En cliquant sur ces liens vous devriez pouvoir trouver tous les renseignements utiles.

  2. Merci pour votre réponse. Ce que je voudrais aussi dire est ceci, le chapitre sur « L’acide ascorbique ou vitamine C » n’a pas de date de parution et ne cite pas ses auteurs. Or il comporte beaucoup d’information très intéressante.

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