Auteur : Pierre Allain

Antagonistes des récepteurs muscariniques – Atropine

L’atropine est un alcaloïde extrait des feuilles d’un arbrisseau appelé Atropa belladona qui agit essentiellement au niveau périphérique.

Action sur le système nerveux autonome

L’atropine est un inhibiteur compétitif des récepteurs cholinergiques muscariniques. Son action se traduit par une diminution du tonus parasympathique, de sorte que l’influence du sympathique devient prépondérante.

Action cardiovasculaire

  1. Action cardiaque : L’effet de l’atropine se traduit essentiellement par une modification du rythme cardiaque :
    • à dose très faible, elle peut donner un ralentissement par stimulation du centre cardio-modérateur.
    • à dose thérapeutique, elle provoque en général une accélération cardiaque par suppression du tonus vagal, et, sous son influence, il n’y a plus de bradycardie réflexe au cours des hypertensions artérielles.
  2. Action vasculaire : comme il n’y a pas de tonus parasympathique au niveau des vaisseaux, l’atropine n’a pas d’effets vasculaires, mais elle s’oppose à la vasodilatation provoquée par une injection intraveineuse d’acétylcholine chez l’animal.
  3. Action sur la pression artérielle :
    • à dose thérapeutique, l’atropine n’entraîne pas de modifications de la pression artérielle en dépit de l’accélération cardiaque.
    • à dose très élevée ou toxique, elle entraîne une chute de la pression artérielle par dépression des centres vasomoteurs et par vasodilatation cutanée, peut-être secondaire à une libération d’histamine.

Action sur l’œil

L’atropine supprime l’influence du parasympathique sur l’œil, ce qui provoque :

  • une dilatation de la pupille par mydriase passive avec augmentation du diamètre de l’iris.
  • une tendance à l’augmentation de la pression intra-oculaire par augmentation du diamètre de l’iris qui gêne, en cas d’angle étroit, l’évacuation de l’humeur aqueuse par le canal de Schlemm. L’atropine est donc contre-indiquée en cas de glaucome.
  • une paralysie de l’accommodation ou cycloplégie perturbant la vision de près.

Il est à noter qu’après administration locale sous forme de collyre, l’atropine a une très longue durée d’action : la dilatation de la pupille peut persister plusieurs jours.

Action sur les muscles lisses

Comme l’acétylcholine a une action contracturante sur tous les muscles lisses sauf sur les muscles vasculaires, l’atropine les relâche : elle a une action antispasmodique.

Sur le tube digestif, elle provoque une diminution du tonus, une diminution de l’amplitude et de la fréquence des contractions péristaltiques; elle s’oppose à l’hypertonie produite par la morphine, ce qui justifie son association à la morphine dans le traitement des coliques.

Sur l’intestin isolé, l’atropine donne une réduction du tonus et du péristaltisme, prévient et supprime la contracture provoquée par l’acétylcholine.

L’action antispasmodique de l’atropine s’exerce aussi sur les voies biliaires, les bronches, les voies urinaires : uretères et vessie. Des urographies ont montré que l’atropine dilate les uretères.

La vessie reçoit une innervation sympathique et parasympathique. Le sympathique tend à la dilater et à contracter le sphincter interne. Le parasympathique, au contraire, contracte la vessie et relâche le sphincter interne. La suppression de l’influence du parasympathique sous l’effet de l’atropine donnera une augmentation du tonus du sphincter interne et une dilatation de la vessie, ce qui favorise la rétention d’urine, surtout en cas d’hypertrophie de la prostate.

L’atropine n’a pratiquement pas d’action sur l’utérus.

Action sur les sécrétions

L’atropine réduit la plupart des sécrétions :

  • Digestives : l’inhibition de la sécrétion salivaire se traduit par une sensation de soif, de sécheresse de la bouche. La réduction de la sécrétion gastrique explique que l’atropine ait été utilisée en thérapeutique comme antisécrétoire gastrique. Elle ne modifie guère la sécrétion pancréatique ni biliaire.
  • Bronchique : la sécrétion bronchique est réduite.
  • Cutanée : elle inhibe la sudation, ce qui donne une peau sèche et chaude. Il faut s’en méfier dans les climats chauds, car l’inhibition de la sudation entraîne une élévation de température, chez les nourrissons notamment.
  • La sécrétion lacrymale est réduite, la sécrétion lactée lors de l’allaitement n’est que peu ou pas modifiée.

Action sur le système nerveux central

A doses thérapeutiques, chez l’homme, l’atropine n’a que peu ou pas d’action sur le système nerveux central, si ce n’est quelquefois une stimulation respiratoire.

L’atropine a été pendant longtemps le seul médicament à avoir une efficacité dans la maladie de Parkinson. Chez l’animal, elle s’oppose aux tremblements provoqués par les cholinomimétiques comme l’oxotrémorine.

L’atropine, et plus encore la scopolamine, abaissent les concentrations d’acétylcholine cérébrales chez l’animal : l’inhibition des récepteurs cholinergiques qu’elles provoquent entraîne une libération exagérée d’acétylcholine, rapidement détruite par les cholinestérases.

A dose élevée, l’action stimulante de l’atropine apparaît et peut se manifester par de l’excitation avec des mouvements incessants, des troubles de la démarche et de la parole, une hyperthermie, des vertiges, des troubles de la vue et de la mémoire, des hallucinations, un véritable délire. Ce tableau qui peut évoquer un épisode schizophrénique aigu ou un delirium alcoolique peut persister quelques heures avant de disparaître ou au contraire s’aggraver. Dans ce dernier cas, à l’excitation fait suite une dépression qui précède la mort par arrêt respiratoire.

Métabolisme

L’atropine est rapidement absorbée par voie digestive et l’on ne recourt à son administration par voie parentérale que lorsque l’on veut obtenir un effet très rapide, par exemple dans le traitement des coliques. Sa demi-vie plasmatique est d’environ quatre heures.

Une partie de l’atropine administrée sous forme de collyre est susceptible de diffuser dans la circulation générale.

Elle traverse la barrière placentaire et des traces d’atropine peuvent être retrouvées dans diverses sécrétions, dont la sécrétion lactée.

La durée d’action de l’atropine administrée par voie générale serait d’environ six heures.

Utilisation thérapeutique

L’atropine a plusieurs indications :

En administration par voie générale

  1. Traitement des syndromes douloureux à composante spasmodique, c’est-à-dire entraînant une contraction exagérée des fibres lisses, coliques hépatiques et coliques néphrétiques notamment.
  2. En anesthésiologie : prévention de la bronchosécrétion, du bronchospasme, du laryngospasme et de réactions réflexes, telle la bradycardie, avant les interventions chirurgicales.
  3. Traitement de certaines intoxications :
    • par les digitaliques, pour s’opposer au ralentissement cardiaque,
    • par les anticholinestérasiques et les champignons de type Amanita muscarina, pour lutter contre les symptômes muscariniques. Dans les intoxications par les anticholinestérasiques comme les organophosphorés, l’atropine s’administre à doses élevées, associée au pralidoxime.

Elle n’est plus utilisée comme antisécrétoire gastrique ni comme antiparkinsonien. Après avoir été très utilisée comme antisécrétoire gastrique dans le traitement de l’ulcère, l’atropine a été remplacée par un antagoniste plus spécifique des récepteurs muscariniques gastriques, la pirenzépine qui, elle-même, a été retirée du commerce car des produits plus actifs, agissant par des mécanismes différents, ont été commercialisés.

Premiers médicaments de la maladie de Parkinson, l’atropine et la scopolamine sont remplacées par les antiparkinsoniens de synthèse qui possèdent des propriétés atropiniques, et surtout par la L-Dopa.

 

Atropine

ATROPINE AGUETTANT* Inj
ATROPINE LAVOISIER*

En administration locale : collyre

L’atropine est un puissant mydriatique à très longue durée d’action, pouvant être remplacé par le tropicamide, à effet moins prolongé.

 

Atropine

ATROPINE* Collyres, plusieurs présentations

Effets secondaires et contre-indications

Les principaux effets secondaires de l’atropine sont la sécheresse de la bouche, la constipation, la sécheresse de la peau, la tachycardie, la mydriase.

Les contre-indications sont essentiellement le glaucome, car elle majore l’hypertension intra-oculaire en cas d’angle étroit, et l’hypertrophie de la prostate (risque de rétention d’urine).

5 commentaires on “Antagonistes des récepteurs muscariniques – Atropine

  1. Bonjour j’ai eu un traitement de 2gtts par jour pendant 3 jours d’atropine 1% en collyre en raison d’un abcès de cornée à amibe oculaire et cela fait plus de 15 jours après arrêt des gouttes que j’ai un strabisme convergent de vision de loin.
    a savoir que très jeune enfant j’avais un strabisme qui avait été corriger. Est ce que ma vision va revenir à la normale ? Actuellement j’ai une vision double de loin c’est très handicapant.

  2. bonsoir, j’ai fait un choc anaphylactique pendant l’anesthésie en vue d’une opération du genou. J’ai fait faire tous les tests allergologiques et l’atropine et la celocurine laissent un doute. Peut on faire ce genre de choc à cause de ces produits.

    • Oui, un choc anaphylactique est possible avec diverses substances, surtout lorsqu’elles sont administrées par voie intraveineuse. lI faut donc faire tout le possible pour les éviter et si on doit y recourir prendre des précautions extrêmes.

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