Auteur : Pierre Allain

Enképhalinomimétiques – Analgésiques morphiniques à effets agonistes et antagonistes : pentazocine, nalbuphine et buprénorphine

Un certain nombre de substances synthétisées en vue de remplacer la morphine ont des propriétés analgésiques de type morphine mais peuvent antagoniser les effets de celle-ci lorsqu’elles sont administrées après elle. On peut classer dans ce groupe la pentazocine, la nalbuphine et la buprénorphine.

Pentazocine

Administrée à un malade non-morphinomane, la pentazocine a une action analgésique proche de celle de la morphine. Administrée à un morphinomane, elle peut favoriser l’apparition d’un syndrome d’abstinence en s’opposant aux effets de la morphine. Cet effet paradoxal s’expliquerait par le fait que la pentazocine a une grande affinité et une faible activité vis-à-vis des récepteurs morphiniques. Administrée seule, elle les stimule; administrée après la morphine, elle prend sa place sur les récepteurs sans avoir son efficacité. La dépendance à la pentazocine serait moindre que celle que donne la morphine; elle est cependant classée parmi les stupéfiants et ses avantages par rapport à la morphine ne sont pas évidents. Ses principaux effets secondaires sont la sédation, les vertiges, les vomissements et, à forte dose, la dépression respiratoire.

Nalbuphine

La nalbuphine est un analgésique majeur dont l’efficacité est proche de celle de la morphine. C’est un agoniste des récepteurs k. Elle antagonise certains effets de la morphine, peut être en raison de son effet inhibiteur des récepteurs m. Elle entraîne une dépression respiratoire dont l’antidote est la naloxone. Mais elle n’est pas spasmogène ni histamino-libératrice L’arrêt brutal de nalbuphine peut être suivi d’un syndrome de sevrage, moindre toutefois de celui de la morphine, ce qui explique qu’elle ne soit pas classée dans la liste des stupéfiants mais dans la liste I.

 

Nalbuphine

NALBUPHINE * Inj 20 mg

Buprénorphine.

La buprénorphine est un morphinomimétique dérivé de la thébaïne, ayant un effet analgésique majeur, équivalent à celui de la morphine, qui dure environ huit heures et qui est obtenu avec une dose beaucoup plus faible que celle de morphine. Elle se fixe aux récepteurs m et k mais elle ne stimule que les récepteurs m. C’est un agoniste partiel des récepteurs m et un antagoniste des récepteurs k.

Elle est utilisée comme analgésique (Temgésic*) et, à posologie plus élevée 0,4, 2 et 8 mg (Subutex*), en tant que médicament de substitution à la morphine chez les toxicomanes.

 

Buprénorphine

TEMGÉSIC* Cp sublingual 0,2 mg, Inj 0,3 mg
SUBUTEX* Cp 0.4, 2 et 8 mg

Elle entraîne moins de dépendance que la morphine, ce qui fait qu’elle n’est pas classée dans la liste des stupéfiants, mais sur la liste I. Sa durée maximum de prescription en tant qu’analgésique est de 28 jours.

Son arrêt brutal entraîne des manifestations moins intenses que celles qui suivent l’arrêt de morphine et sont plus tardives.

La buprénorphine peut donner une dépression respiratoire surtout lors des premières prises et à posologie élevée, c’est-à-dire avec le Subutex ; elle est majorée par la prise concomitante de benzodiazépines. La dépression respiratoire provoquée par la buprénorphine est mal corrigée par l’administration ultérieure de naloxone mais elle serait prévenue par la prise préalable ou concomitante de naloxone. Ceci s’explique sans doute par la grande affinité de la buprénorphine pour les récepteurs enképhalinergiques ; il est possible de prévenir sa fixation aux récepteurs mais il est difficile de l’en détacher.

Par ailleurs, la prise de buprénorphine par un morphinomane venant de prendre de la morphine ou de l’héroïne, ou encore de la méthadone, peut déclencher un syndrome de sevrage en raison du caractère agoniste-antagoniste de la buprénorphine.