Auteur : Pierre Allain

Inhibiteurs des interactions virus-cellule cible

L’adhésion des cellules les unes aux autres ou à la matrice extracellulaire joue un rôle essentiel dans l’extension des lésions, les phénomènes métastatiques, thrombotiques et infectieux.

En matière d’infectiologie, la plupart des recherches sont consacrées à la fixation (attachment) du virus à la cellule cible, à sa pénétration et à la libération des nouveaux virus à partir de la cellule infectée.

Ces études concernent principalement le virus du SIDA qui se fixe par une protéine de sa capside, appelée Gp120, à la protéine plasmique de la cellule hôte, CD4+, appelée récepteur, présente sur les lymphocytes T, les monocytes et les macrophages et le virus de la grippe.

Antigrippaux : amantadine et rimantadine

L’amantadine et la rimantadine réduisent l’extension de l’infection grippale en inhibant la fixation du virus à la cellule cible par modification de l’hémaglutinine et en inhibant la sortie des acide nucléique hors de la capside (uncoating) dans la cellule cible. L’amantadine et la rimantadine se fixent à la protéine-canal ionique de la nucléocapside du virus de la grippe, appelée M2, qui est absente chez le virus B. La protéine M2 régule le pH du virus et la conformation de son hémagglutinine intervenant dans sa fixation à la cellule cible.

L’amantadine est utilisée dans le traitement de la grippe de type A, à titre préventif et curatif en début de maladie, ainsi que dans le traitement de la maladie de Parkinson.

Ses principaux effets indésirables sont de type neuropsychiatrique : nervosité, insomnie, parfois confusions et hallucinations, rarement convulsions.

Amantadine

MANTADIX* Gélules

La rimantadine n’est plus commercialisée en France.

Antigrippaux : Inhibiteurs de la neuraminidase

La neuraminidase est une enzyme , présente à la surface des virus A et B de la grippe, qui détache des glycoconjugués les résidus acide N-acétyl neuraminique, également appelé acide sialique. Cette hydrolyse, est une étape nécessaire à la diffusion de l’infection virale par libération des particules virales à partir de la surface des cellules infectées en direction de nouvelles cellules-cibles.

Les inhibiteurs de la neuraminidase, administrés préventivement ou en tout début de la grippe, réduisent sa gravité. Les deux inhibiteurs les plus connus sont le zanamivir et l’oseltamivir, analogues de l’acide sialique.

Zanamivir

RELENZA* Dispositif pour inhalation

Le zanamivir qui s’administre par voie bronchique et par voie nasale peut être à l’origine de dyspnées et de bronchospasmes qui doivent conduire à l’arrêt de sa prescription.

L’oseltamivir qui s’administre par voie buccale est une prodrogue transformée dans l’organisme en produit actif; utilisé pour la prévention après exposition et le traitement de la grippe. Son effet indésirable le plus fréquent sont des nausées.

Oseltaminir

TAMIFLU* Gél

Bien que l’efficacité du zanamivir et de l’oseltamivir dans la grippe banale semble modérée, ils ont été, notamment l’oseltamivir, considérés comme pouvant être efficaces en cas de grippe aviaire et ont fait l’objet de stockage dans divers pays. En complément, voir  Grippe, vaccin et antiviraux.

Inhibiteurs de l’entrée du VIH dans la cellule cible, enfuvirtide

L’entrée du VIH dans la cellule hôte comporte schématiquement 2 étapes presque simultanées, fixation puis fusion ponctuelle de leurs membranes, par l’intermédiaire de leurs protéines de surface, notamment :

  • les protéines virales associées l’une à l’autre, gp120 (qui intervient dans la fixation) et gp41 (qui intervient dans la fusion);
  • la molécule CD4, appelée également récepteur CD4, et les co-récepteurs CXCR4 et CCR5 (qui sont en réalité des récepteurs aux chémokines, du lymphocyte T et de certains autres types de cellules.

Selon leur mécanisme d’action, les inhibiteurs d’entrée du VIH se divisent en- inhibiteurs de la fixation (attachment) agissant sur le gp 120 ou la protéine CD4, – les antagonistes des co-récepteurs CCR5 ou CXCR4, -et les inhibiteurs de la fusion.

L’enfuvirtide est un polypeptide de synthèse formé de 36 acides aminés est un inhibiteur de la fusion. Appelé initialement T-20 et pentafuside, l’enfuvirtide se fixe sur la protéine g41, l’empêche de remplir son rôle et empêche la fusion des membranes et inhibe ainsi l’entrée du VIH dans les cellules hôtes comme les lymphocytes T.

L’enfuvirtide s’administre par voie sous-cutanée, deux fois par jour. Pour éviter l’apparition rapide de résistances, il faut toujours l’utiliser en association à d’autres anti-HIV.

Enfuvirtide

FUZEON*, Inj

Le maraviroc, produit de synthése, est un inhibiteur de l’entrée du virus dans la cellule ; il agit en bloquant le co-récepteur CCR5 du lymphocyte T qui, ainsi, ne peut plus interagir avec le gp120 viral. Le maraviroc a obtenu en 2007 son AMM européenne sous le nom de Celsentri*, comprimés à 150 et 300mg.

Maraviroc

CELSENTRI*, comprimés à 150 et 300 mg

 

Autres

Le pléconaril, classé parmi les antipicornavirus, se fixe à la capside des entérovirus et des rhinovirus et réduit l’extension des infections correspondantes.

Le docosanol est un alcool saturé de 22 carbones, qui interagit avec l’enveloppe lipidique de certains virus comme les herpesvirus, et réduit leur infectiosité. Il est commercialisé sous forme de crème à 10 %, Abreva* aux USA et Erazaban* en France. Il est utilisé dans le traitement de l’herpès simplex labial.

Docosanol

ERAZABAN* Crème à 10 %

 

Remarque

Le bleu de trypan qui est un colorant empêche expérimentalement les virus de se fixer sur les cellules et d’y pénétrer. Il inhibe la synthèse de l’enveloppe virale à partir des structures membranaires de la cellule infectée. Il n’est pas utilisé comme médicament.