Auteur : Pierre Allain

Lipides

Les trois principaux constituants des lipoprotéines du plasma sont les acides gras, le cholestérol et les apoprotéines.

Acides gras

Les acides gras de formule générale CH3-(CH2)n-COOH sont caractérisés par leur longueur, c’est-à-dire le nombre d’atomes de carbone, et par l’existence ou non de double liaison.

Ils sont soit saturés, c’est-à-dire ne comportant pas de double liaison, soit insaturés, comportant une ou plusieurs doubles liaisons. La position de la double liaison s’indique habituellement par la lettre n ou w suivie d’un chiffre correspondant au nombre d’atomes de carbone à partir du CH3 d’une extrémité de la chaîne jusqu’à la première double liaison. La présence de doubles liaisons dans un acide gras insaturé le rend plus fluide que l’acide saturé correspondant et abaisse sa température de fusion. La présence d’acides gras insaturés chez les poissons d’eau froide leur évite de se « solidifier ».

Les acides gras insaturés peuvent être de type cis ou de type trans. La structure des acides gras insaturés trans ressemble à celle des acides gras saturés. Les acides gras insaturés cis sont plus fluides que les acides gras insaturés trans ayant le même nombre d’atomes de carbone et de doubles liaisons.

Trois acides gras C18

Il y a peu d’isomères trans dans l’alimentation à l’exception de certaines graisses de ruminants et de graisses soumises à une hydrogénation partielle pour les solidifier, comme les margarines. Il existe cependant des margarines composées essentiellement d’acides gras insaturés de type cis.

Dans le plasma, les acides gras saturés et insaturés existent essentiellement sous une forme estérifiée formant avec le glycérol les triglycérides (environ 100 g de triglycérides sont utilisés quotidiennement par un adulte) et avec le cholestérol, le cholestérol estérifié.

Une enzyme, la lipoprotéine lipase, présente au niveau des capillaires sanguins, hydrolyse partiellement les triglycérides en acides gras qui seront utilisés par les tissus et en glycérol.

Cholestérol

Le cholestérol est indispensable à la vie. Il entre dans la composition des membranes cellulaires et est nécessaire à la synthèse des hormones stéroïdes.

Il a deux origines : l’une exogène, alimentaire, pour environ 0,5 g/jour et l’autre endogène, par synthèse, pour environ 1 g/jour.

La synthèse endogène du cholestérol s’effectue à partir de l’acétyl CoA. Elle comporte plusieurs étapes enzymatiques. Elle est régulée par l’hydroxy-méthyl-glutaryl-coenzyme-A réductase qui transforme l’hydroxy-méthyl-glutaryl-coenzyme-A (HMG-CoA) en mévalonate. L’activité de la HMG-CoA réductase augmente lorsque l’apport alimentaire de cholestérol diminue et diminue dans le cas inverse. Elle est beaucoup plus importante la nuit que le jour.

La lécithine-cholestérol-acyl-transférase (LCAT), enzyme synthétisée par le foie, véhiculée dans le plasma par les a-lipoprotéines, estérifie le cholestérol des HDL par un acide gras provenant de la lécithine ou phosphatidylcholine.

Le cholestérol est transformé au niveau hépatique en acides biliaires qui s’éliminent par la bile mais peuvent ensuite être réabsorbés (cycle entéro-hépatique). L’enzyme qui régule la transformation du cholestérol en acides biliaires est une 7-a-hydroxylase, dont l’activité est inhibée par les sels biliaires présents dans les cellules hépatiques.

Apoprotéines liées aux lipides

Les apoprotéines liées aux lipides, dont le poids moléculaire va de 7 000 (C1) à 250 000 (B), sont synthétisées surtout par le foie et accessoirement par les autres tissus. On distingue les apoprotéines A1, A2, B100, B48, C1, C2, E, etc. Ces apoprotéines jouent un rôle extrêmement important :

  • Elles assurent la fixation et la captation des lipoprotéines par les récepteurs membranaires situés au niveau du foie et des autres tissus.
  • Elles sont responsables de l’activation de certaines enzymes. L’apoprotéine C2, présente dans les VLDL, les LDL et les HDL, active la lipoprotéine lipase, fonction également assurée par l’héparine. L’apoprotéine A1 active la LCAT.

Les différentes lipoprotéines plasmatiques

Les trois constituants précédents : acides gras, cholestérol, apoprotéines ainsi que phospholipides, se combinent dans des proportions différentes pour former des complexes macromoléculaires, véritables particules, appelées, en fonction de leur densité, chylomicrons, VLDL (very-low density-lipoproteins), LDL (low-density-lipoproteins) et HDL (high-density-lipoproteins). Ces particules sont formées d’un noyau central constitué de cholestérol estérifié et de triglycérides, entouré d’une couche externe hydrophile constituée de phospholipides, de cholestérol libre et d’apoprotéines qui permettent leur fixation sur les récepteurs spécifiques.

  • Les chylomicrons sont formés essentiellement de triglycérides. Ils contiennent très peu d’apoprotéines. Leur demi-vie plasmatique est courte, de l’ordre de 6 minutes.
  • Les VLDL sont formées de 90% de lipides, essentiellement de triglycérides, les apoprotéines étant essentiellement de type E, C et B100. Leur demi-vie plasmatique est de l’ordre de 6 heures. Leur rôle est de transporter les triglycérides du foie vers les tissus où, au contact de la lipoprotéine lipase des capillaires, ils libèrent leurs acides gras qui sont utilisés.
  • Les LDL sont formées de 75% de lipides; leur principal constituant est le cholestérol. L’apoprotéine essentielle est de type B100. Leur demi-vie plasmatique est de l’ordre de 4 jours. Elles alimentent les tissus en lipides, ce qui explique que leur élévation puisse entraîner des surcharges lipidiques. Les LDL oxydées sont particulièrement athérogènes.
    Parmi les LDL, la lipoprotéine Lp(a) joue un rôle important dans l’athérogenèse. Elle renferme, outre l’apoprotéine B100, une apoprotéine (a) dont la structure ressemble à celle de certaines molécules adhésives et à celle du plasminogène. Elle pourrait s’opposer à la transformation du plasminogène en plasmine et à la fibrinolyse.
  • Les HDL sont formées d’environ 50% de lipides, les apoprotéines étant de type A1 et A2. Leur demi-vie plasmatique est d’environ 6 jours. Ces lipoprotéines débarrassent les tissus extra-hépatiques, en particuliers les artères, des surcharges lipidiques, d’où leur rôle protecteur.

Remarque

L’alcool éthylique à dose modérée, peut-être en élevant la concentration des HDL mais le mécanisme exact n’est pas connu réduit la fréquence des accidents coronariens.

Vue d’ensemble du métabolisme des lipoprotéines

L’alimentation apporte des lipides qui, dans le tube digestif, sont émulsionnés par les sels biliaires et hydrolysés par les enzymes. Le tube digestif absorbe le cholestérol, les acides gras ainsi que le glycérol.

Dans l’entérocyte, les acides gras estérifiés en triglycérides s’associent au cholestérol estérifié pour former des chylomicrons.

Ces chylomicrons sont ensuite excrétés dans la lymphe par exocytose. Au niveau des vaisseaux, la lipopoprotéine lipase détache certains acides gras des chylomicrons dont les « restes » (remnants) sont captés par le foie qui récupère le cholestérol. Le foie assure d’autres fonctions :

  • Il synthétise la plus grande partie du cholestérol.
  • Il capte les LDL par endocytose grâce à des récepteurs dont le nombre est régulé.
  • Il catabolise le cholestérol en acides biliaires.
  • Il libère dans la circulation les VLDL.

Les VLDL libérées vont, sous l’influence de la lipoprotéine lipase, perdre les acides gras pour devenir des IDL (ntermediary density lipoproteins) ensuite transformées en LDL captées par des récepteurs du foie mais aussi des tissus extra-hépatiques.

Les tissus extra-hépatiques qui ont fixé les LDL retiennent une partie du cholestérol et excrètent le reste sous forme de HDL. Le cholestérol libre des HDL est estérifié par la LCAT du plasma et ainsi transformé en IDL puis en LDL capté par le foie.

En pathologie, on distingue les hyperlipoprotéinémies secondaires, dues au diabète, à l’hypothyroïdie, à l’utilisation de pilules contraceptives fortement dosées, et les hyperlipoprotéinémies d’origine primaire, essentiellement familiales, avec élévation prédominante des chylomicrons (triglycérides), des VLDL ou des LDL.

Le diagnostic d’une hyperlipoprotéinémie se fait par le dosage plasmatique du cholestérol total, du cholestérol de type LDL et du cholestérol HDL, ainsi que par le dosage spécifique des apoprotéines. Il est important de souligner que le prélèvement sanguin doit être fait après un jeûne d’au moins 12 heures, sur un sujet allongé, en évitant une hémoconcentration par maintien trop prolongé du garrot.

Nous indiquons ci-dessous les valeurs considérées comme « normales » des paramètres du bilan lipidique utilisé en biologie clinique :

 

En g par litre

Cholestérol total

1,50 à 2,40

LDL cholestérol

1,00 à 1,60

HDL cholestérol

0,35 à 0,65

Triglycérides

0,50 à 1,50