Auteur : Pierre Allain

Inhibiteurs de la pompe H+/K+-ATPase

L’oméprazole a été le premier inhibiteur de la pompe à protons, suivi du lansoprazole et plus récemment du pantoprazole et du rabéprazole. L’ésoméprazole est l’isomère S de l’oméprazole qui est un racémique.

Effets

L’oméprazole, le lansoprazole, le pantoprazole et le rabéprazole, inhibiteurs irréversibles de la pompe à protons, n’agissent pas directement par contact avec la muqueuse gastrique mais après absorption intestinale, distribution dans l’organisme sous forme non ionisée et sécrétion dans la zone canaliculaire des cellules pariétales gastriques.

Dans le micro-canal où le pH est bas, voisin de 2, ces inhibiteurs sont ionisés et transformés en molécules actives qui établissent des liaisons covalentes avec le groupe SH de la cystéine de la sous-unité a de la pompe. La pompe est ainsi inhibée d’une manière irréversible. La reprise d’activité de pompage nécessite la synthèse de nouvelles pompes. Comme la demi-vie de renouvellement des pompes est de l’ordre de 18 à 24 heures, une prise unique permet une inhibition de près de 24 heures.

Le fait que les inhibiteurs ne soient actifs qu’en milieu acide, après protonation, explique qu’ils ont peu d’effets sur la H+/K+-ATPase extra-gastrique située au niveau du rein et du colon.

Si ces inhibiteurs étaient administrés sous forme non gastro-résistante, ils se transformeraient en métabolite actif dans l’estomac, mais sans pour autant atteindre au niveau du micro-canal une concentration suffisante pour inhiber la pompe à protons.

La sécrétion de Cl qui est parallèle à celle de H+ pour donner HCl, n’est pas directement modifiée par les inhibiteurs de la H+/K+-ATPase. Le mécanisme de la sécrétion de Cl reste mal connu. Elle paraît couplée à celle du potassium, ce qui permet le recyclage de ce dernier.

Une conséquence de l’inhibition de H+/K+-ATPase gastrique est l’élévation réactionnelle de la gastrinémie, très importante chez le rat, mais faible chez l’homme. L’hypergastrinémie pourrait entraîner une hyperplasie des cellules entérochromaffines.

Caractéristiques pharmacocinétiques

Les inhibiteurs de la pompe à protons sont administrés par voie buccale sous une forme gastro-résistante, à délitement intestinal. Il existe une présentation d’oméprazole et d’ésoméprazole destinée à être administrée par voie intraveineuse.

Administrés par voie buccale, ils sont absorbés par l’intestin et se distribuent dans l’ensemble de l’organisme. Leur demi-vie plasmatique est d’environ une heure mais, comme ils inhibent l’enzyme H+/K+-ATPase d’une manière irréversible, leur action dure le temps du renouvellement de l’enzyme, c’est-à-dire près de 24 heures.

De nouvelles molécules en cours de développement inhibent réversiblement la pompe H+/K+-ATPase et sont actives sans métabolisation préalable.

Indications

Les inhibiteurs de la pompe à protons sont indiqués dans le traitement de l’ulcère gastrique et de l’ulcère duodénal, du reflux gastro-sophagien, du syndrome de Zollinger-Ellison qui est caractérisé par une hypersécrétion gastrique consécutive à une hypergastrinémie.

Ils sont également utilisés dans le traitement et la prévention des atteintes gastro-duodénales provoquées par les anti-inflammatoires non stéroïdiens. L’efficacité clinique de ces produits est démontrée.

Oméprazole

MOPRAL* Gélules 10 et 20 mg, Inj

Esoméprazole INEXIUM* CP 20 et 40 mg, Inj

Lansoprazole

LANZOR* Gélules 30 mg
OGAST* Gélules 30 mg

Pantoprazole

EUPANTOL* Cp 40 mg
INIPOMP* Cp 40 mg

Rabéprazole

PARIET* C p 10 et 20 mg

Effets indésirables

La diminution de l’acidité gastrique pourrait favoriser le développement de certaines bactéries.

Par ailleurs, les inhibiteurs de la pompe à protons peuvent donner quelques troubles digestifs, constipation ou diarrhée, des céphalées et, rarement, une confusion mentale ou une anomalie hématologique. Des troubles de la vue et de l’audition ont été signalés après administration parentérale d’oméprazole. Les mécanismes à l’origine des effets indésirables restent mal connus.

L’oméprazole et le lansoprazole sont métabolisés par le cytochrome P-450 et les interactions métaboliques avec d’autres médicaments sont possibles mais pas clairement démontrées.

Bien qu’ils n’aient pas montré d’effet tératogène lors des expérimentations animales, leur prescription, comme celle de beaucoup de médicaments récents, est déconseillée pendant la grossesse, notamment durant le premier trimestre.

Remarques

  1. L’ulcère gastroduodénal n’apparaît et ne se maintient que s’il y a sécrétion acide de l’estomac, sans pour autant que l’acidité gastrique soit la cause directe de la maladie. Celle-ci est liée à la présence au niveau de la muqueuse gastrique de Helicobacter pylori.
    L’inhibition de la sécrétion gastrique acide permet d’obtenir une guérison de l’ulcère gastrique ou duodénal. Mais, en absence d’éradication de Helicobacter pylori, la maladie risque de reprendre à l’arrêt du traitement antisécrétoire.

    L’éradication de Helicobacter pylori par un traitement associant deux antibiotiques (ou un antibiotique et un sel de bismuth) pendant environ deux semaines constitue le traitement étiologique.
  2. Les antiacides neutralisent l’acidité gastrique et les topiques gastro-intestinaux protègent la muqueuse gastrique et duodénale en la tapissant et en agissant sur le mucus. Le même médicament peut avoir des propriétés anti-acides et topiques. Les principaux topiques gastroduodénaux et intestinaux sont des dérivés de l’aluminium et des dérivés mixtes de magnésium et d’aluminium.
  3. La protonthérapie est une technique de radiothérapie qui utilise les protons produits par ionisation de l’atome d’hydrogène et accélérés par de puissantes machines de type cyclotron vers la tumeur à traiter. La protonthérapie est utilisée dans le traitement du mélanome oculaire et des tumeurs de la base du crâne.
  4. Il existe une pompe à protons H+-ATPase, localisée au niveau des vacuoles des ostéoclastes. Cette pompe crée par sécrétion de protons un environnement acide qui dissout la partie minérale de l’os et permet aux collagénases de détruire la matrice protéique. Des recherches pour trouver des inhibiteurs spécifiques de cette pompe sont en cours en vue de ralentir la perte osseuse et l’aggravation de l’ostéoporose.