Auteur : Pierre Allain

Inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine

L’enzyme de conversion de l’angiotensine est en grande partie responsable de la formation d’angiotensine II à partir de l’angiotensine I et de la dégradation de la bradykinine. Le premier inhibiteur de l’enzyme de conversion ou IEC a été le captopril. Depuis, de nombreux autres IEC ont été découverts et commercialisés : énalapril, lisinopril, périndopril, quinapril, ramipril, bénazépril, cilazapril, trandolapril, fosinopril et moexipril.

Conséquences de l’inhibition

Après administration d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion :

  • les effets de l’injection d’angiotensine I, vasoconstriction et sécrétion d’aldostérone, sont diminués ou supprimés
  • les effets de l’injection d’angiotensine II, vasoconstriction et sécrétion d’aldostérone, ne sont pas modifiés
  • les effets de la bradykinine, qui n’est plus détruite par l’enzyme de conversion, sont augmentés. L’augmentation de la concentration de bradykinine favorise à son tour la formation d’oxyde nitrique et de la prostaglandine PGI2.

Conséquences de l’inhibition de l’enzyme de conversion

Effets

Les IEC provoquent :

  1. une diminution de la pression artérielle moyenne, systolique et diastolique, chez les sujets normaux et encore plus chez les hypertendus, qu’ils aient ou non une élévation de l’angiotensine plasmatique. De plus, ils augmentent le débit sanguin rénal.
  2. une diminution de la sécrétion d’aldostérone qui ne disparaît pas cependant, car elle dépend aussi de la sécrétion d’ACTH et de la concentration de potassium.
  3. une augmentation de l’excrétion sodée par diminution de la sécrétion d’aldostérone.
  4. une diminution du développement des lésions athéromateuses et de l’hypertrophie cardiaque, par des mécanismes qui restent à préciser.

Caractéristiques pharmacocinétiques

La structure chimique des IEC comporte un groupe acide R-COOH. Certains IEC comme le captopril, le lisinopril sont administrés sous forme R-COOH, c’est-à-dire que le produit administré est lui-même actif. D’autres comme l’énalapril, le périndopril, le bénazépril, le moexipril sont administrés sous forme d’esters R-CO-O-C2H5 inactifs. L’estérification favorise leur absorption digestive et la liaison ester est ensuite hydrolysée dans l’organisme, libérant la forme acide active.

Utilisation

Indications

Les IEC sont des médicaments qui ont démontré leur efficacité dans le traitement :

  • de l’hypertension artérielle
  • de l’insuffisance cardiaque où, par diminution des résistances périphériques, ils facilitent le travail du cœur et, par effets directs, s’opposent au développement de l’hypertrophie cardiaque. L’amélioration des conditions hémodynamiques chez l’insuffisant cardiaque fait baisser les catécholamines plasmatiques.
  • du post-infarctus du myocarde avec dysfonction ventriculaire gauche.
  • des néphropathies diabétiques.

Au cours de nombreuses études cliniques les IEC ont réduit les manifestations pathologiques et aussi réduit la mortalité toutes causes confondues.

Le rapport effets bénéfiques / effets indésirables de la plupart des IEC commercialisés est assez voisin et il n’y a pas d’argument indiscutable en faveur de l’un d’eux. Comme pour tout antihypertenseur, il faut commencer le traitement par une faible posologie que l’on augmente progressivement en fonction des résultats.

Présentations pharmaceutiques

 

Captopril

LOPRIL* Cp 25 et 50 mg

Enalapril

RENITEC* Cp 5 et 20 mg

Lisinopril

PRINIVIL* Cp 5 et 20 mg

Périndopril

COVERSYL* Cp 2,5, 5 et 10 mg

Quinapril

ACUITEL* Cp 5 et 20 mg

Ramipril

TRIATEC* Cp 1,25, 2,5 et 5mg

Bénazépril

CIBACÈNE* Cp 5 et 10 mg

Cilazapril

JUSTOR* Cp 0,5, 1 et 2,5 mg

Trandolapril

ODRIK* Gélules à 0,5, 2 et 4 mg

Fosinopril

FOZITEC* Cp 10 et 20 mg

Moexipril

MOEX* Cp 7,5 et 15 mg

Imidapril

TANATRIL* Cp 5 et 10 mg

Zofénopril ZOFENIL* Cp 15 et 30 mg

L’association d’un diurétique de type thiazidique à un IEC est souvent utile et il existe plusieurs préparations pharmaceutiques de ce type. Nous en citons quelques exemples.

 

Captopril + Hydrochorothiazide

CAPTEA* Cp

Enalapril + Hydrochlorothiazide

CORENITEC*

Lisinopril + Hydrochlorothiazide

PRINZIDE*

Bénazépril + Hydrochlorothiazide

BRIAZIDE*

Quinapril + Hydrochlorothiazide

ACUILIX*

Fosinopril + Hydrochlorothiazide

FOZIRETIC*

Périndopril + Indapamide

PRETERAX*

L’association d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion à un inhibiteur calcique existe également.

 

Trandolapril + Vérapamil

TARKA* LP Gelules

Effets indésirables

Les principaux effets indésirables des IEC sont les suivants :

  • Hypotension artérielle, généralement la conséquence d’une prescription inadaptée ou excessive.
  • Hyperkaliémie théoriquement possible du fait de la réduction de la sécrétion d’aldostérone, mais qui ne s’observe qu’en cas de supplémentation potassique inadaptée ou d’insuffisance rénale.
  • Insuffisance rénale qui peut s’observer en cas de sténose bilatérale des artères rénales, par suppression de la vasoconstriction des artérioles glomérulaires efférentes, entraînant une baisse de la filtration glomérulaire. Ce mécanisme pourrait également intervenir chez certains malades traités par diurétiques ou en régime désodé sévère.
  • Toux de type irritatif, sans expectoration, qui peut s’observer chez les malades traités par n’importe quel IEC. Devant une toux inexpliquée le médecin doit avoir présente à l’esprit cette possibilité. Son mécanisme n’est pas connu, on suppose que la bradykinine et peut-être certaines prostaglandines joueraient un rôle.
  • Réactions d’hypersensibilité (urticaire, oedème de Quincke ou angio-œdème pouvant être grave surtout en cas de localisation au niveau de la glotte ou du larynx, par exemple), sous doute liées à l’augmentation de la concentration de bradykinine.
  • Dysgueusies de type agueusie, surtout avec le captopril lorsqu’il était utilisé à dose élevée.
  • La prescription des IEC à la femme enceinte est déconseillée en début de grossesse en raison d’un faible risque tératogène mais surtout au cours du deuxième ou troisième trimestre en raison du risque d’apparition d’une insuffisance rénale grave chez l’enfant.